Aural Delight - Paradise of Japan
Je pense avoir été amoureux de Tujiko Noriko il y a cinq ans, de façon sans doute un peu adolescente. C’est de la faute à Peter Rehberg. Je regardais un jour le site de Mego, à la recherche, comme il est normal par là, de machins un peu noisy ou alors très clicks-and-cuts ou surtout très glitchy, sans mélodie évidente. Et puis voilà que je vois le nom de la demoiselle. Déjà infatué de musique japonaise, ma curiosité a été éveillée, je suis allé voir de quoi il s’agissait. Il y avait un mp3 et la surprise fut grande en découvrant cette musique délicate et cristalline.
Quelques jours plus tard, l’album « Hard ni sasete » est arrivé chez moi, coup de foudre. Noriko – je préfère l’appeler par son prénom, comme si je la connaissais vraiment- a toujours traîné l’étiquette de Björk nippone, c’est dire à quel points les journalistes sont paresseux parce qu’il n’y a aucun point de comparaison. En plus, Noriko fait de la meilleure musique, oh que oui. Enfin bref, moi je la vois plus comme une héritière de Haco, parce qu’elle aussi développe un univers personnel, elle aussi fait un gros travail sur l’électronique pour créer des mélodies là où c’est pas toujours évident, elle aussi a une superbe voix, parce que j’ai envie qu’il en soit ainsi. Je lui avais soumis l’idée en 2003 lorsque je l’avais interviewée pour la seconde fois (j’ai perdu l’enregistrement avant de pouvoir le retranscrire) et elle n’était pas franchement convaincue. Je me souviens qu’elle m’a juste dit que Haco lui faisait peur. C’est vraiment étrange : elle est toute petite, toute gentille et n’a pas l’air effrayante. Sans doute sa musique est-elle trop étrange pour Noriko ? Cette fois-là, je lui avais donné un single de Tha Blue Herb, le meilleur groupe hiphop du monde, Hokkaido style. Etait-ce aussi trop étrange pour elle ?
Evidemment, après cet « Hard ni sasete », je me suis plongé dans les albums précédents, surtout l’époustouflant « Shojo Toshi ». Ce que j’aime vraiment chez Noriko, c’est que la musique est d’apparence assez simple, directe. Ce n’est pas évident – c'est-à-dire que ce n’est pas immédiatement compréhensible pour le fan de pop lambda-, mais on peut finalement rentrer dedans assez facilement, dans ces espèces de notes mélodiques étirées langoureusement un peu comme un chat qui s’allonge le plus possible au moment du réveil. C’est apaisant et réconfortant pour peu que la mélancolie vous réconforte. Il y a aussi – et peut-être surtout- un énorme pouvoir évocateur dans les sons de Noriko. Je trouve qu’on rate le coche si l’on essaie d’en parler de façon objective, décrivant ce qui se passe musicalement, toutes ces couches de sources sonores variées et foutraques : c’est au contraire les images qui naissent, ces visions de voyage en train jusqu’à Narita, de cigales dans les arbres, de réveils dans le vent d’été, scène de séparation, de retrouvaille qui importent.
En 2003, Noriko quitte Mego pour Tomlab et sort « From Tokyo to Naiagara », un album plus directement pop. C’est une réussite absolue, un petit chef-d’œuvre réalisé en collaboration avec quelques uns des musiciens les plus intéressants du Japon (le roi des tapes Aki Onda, le percussioniste Samm Bennett). On a ici une sorte d’affinage du son Noriko, une liqueur essentielle mise au service de véritables chansons. Après, Noriko s’est mise à travailler sur des collaborations pas toujours aussi brillantes que son travail solo. Je pense par exemple à son album avec Aoki Takamasa, nettement inférieur à l’incroyable morceau qu’ils avaient enregistré ensemble pour l’album « Indigo Rose », ou à « Blurred in my mirror » avec Lawrence English – rien de ça n’est mauvais, mais ça n’a franchement pas le niveau attendu. Par contre, « J », le CD sorti sous le nom de RATN avec Riow Arai est splendide de bout en bout et par moment bouleversant.
Après deux années consacrées au cinéma, Noriko est de retour sur Mego en solitaire. Le bien nommé « Solo » ne m’a pas convaincu à la première écoute inattentive, non pas que ça me paraissait mauvais, simplement que ça ne m’accrochait pas autant. Pas vraiment une surprise vu mon processus de distanciation avec le fait musical ces dernières années. J’avais tort puisqu’une seconde écoute a fait office de claque de velours me rappelant à la réalité : Noriko, c’est toujours magique. Peut-être plus épuré, moins riche dans les sources de son, plus direct, le résultat reste assez fantastique grâce à ces mélodies étrangement entêtantes et la splendeur de sa voix. En 2007, je ne suis sans doute plus amoureux de Noriko-san, mais sa musique mérite toujours d’être aimée.
Quelques jours plus tard, l’album « Hard ni sasete » est arrivé chez moi, coup de foudre. Noriko – je préfère l’appeler par son prénom, comme si je la connaissais vraiment- a toujours traîné l’étiquette de Björk nippone, c’est dire à quel points les journalistes sont paresseux parce qu’il n’y a aucun point de comparaison. En plus, Noriko fait de la meilleure musique, oh que oui. Enfin bref, moi je la vois plus comme une héritière de Haco, parce qu’elle aussi développe un univers personnel, elle aussi fait un gros travail sur l’électronique pour créer des mélodies là où c’est pas toujours évident, elle aussi a une superbe voix, parce que j’ai envie qu’il en soit ainsi. Je lui avais soumis l’idée en 2003 lorsque je l’avais interviewée pour la seconde fois (j’ai perdu l’enregistrement avant de pouvoir le retranscrire) et elle n’était pas franchement convaincue. Je me souviens qu’elle m’a juste dit que Haco lui faisait peur. C’est vraiment étrange : elle est toute petite, toute gentille et n’a pas l’air effrayante. Sans doute sa musique est-elle trop étrange pour Noriko ? Cette fois-là, je lui avais donné un single de Tha Blue Herb, le meilleur groupe hiphop du monde, Hokkaido style. Etait-ce aussi trop étrange pour elle ?
Evidemment, après cet « Hard ni sasete », je me suis plongé dans les albums précédents, surtout l’époustouflant « Shojo Toshi ». Ce que j’aime vraiment chez Noriko, c’est que la musique est d’apparence assez simple, directe. Ce n’est pas évident – c'est-à-dire que ce n’est pas immédiatement compréhensible pour le fan de pop lambda-, mais on peut finalement rentrer dedans assez facilement, dans ces espèces de notes mélodiques étirées langoureusement un peu comme un chat qui s’allonge le plus possible au moment du réveil. C’est apaisant et réconfortant pour peu que la mélancolie vous réconforte. Il y a aussi – et peut-être surtout- un énorme pouvoir évocateur dans les sons de Noriko. Je trouve qu’on rate le coche si l’on essaie d’en parler de façon objective, décrivant ce qui se passe musicalement, toutes ces couches de sources sonores variées et foutraques : c’est au contraire les images qui naissent, ces visions de voyage en train jusqu’à Narita, de cigales dans les arbres, de réveils dans le vent d’été, scène de séparation, de retrouvaille qui importent.
En 2003, Noriko quitte Mego pour Tomlab et sort « From Tokyo to Naiagara », un album plus directement pop. C’est une réussite absolue, un petit chef-d’œuvre réalisé en collaboration avec quelques uns des musiciens les plus intéressants du Japon (le roi des tapes Aki Onda, le percussioniste Samm Bennett). On a ici une sorte d’affinage du son Noriko, une liqueur essentielle mise au service de véritables chansons. Après, Noriko s’est mise à travailler sur des collaborations pas toujours aussi brillantes que son travail solo. Je pense par exemple à son album avec Aoki Takamasa, nettement inférieur à l’incroyable morceau qu’ils avaient enregistré ensemble pour l’album « Indigo Rose », ou à « Blurred in my mirror » avec Lawrence English – rien de ça n’est mauvais, mais ça n’a franchement pas le niveau attendu. Par contre, « J », le CD sorti sous le nom de RATN avec Riow Arai est splendide de bout en bout et par moment bouleversant.
Après deux années consacrées au cinéma, Noriko est de retour sur Mego en solitaire. Le bien nommé « Solo » ne m’a pas convaincu à la première écoute inattentive, non pas que ça me paraissait mauvais, simplement que ça ne m’accrochait pas autant. Pas vraiment une surprise vu mon processus de distanciation avec le fait musical ces dernières années. J’avais tort puisqu’une seconde écoute a fait office de claque de velours me rappelant à la réalité : Noriko, c’est toujours magique. Peut-être plus épuré, moins riche dans les sources de son, plus direct, le résultat reste assez fantastique grâce à ces mélodies étrangement entêtantes et la splendeur de sa voix. En 2007, je ne suis sans doute plus amoureux de Noriko-san, mais sa musique mérite toujours d’être aimée.