NBA 2007: Berlinski - Fieldwork
Mischa Berlinski, jeune journaliste indépendant en Thaïlande, apprend par l’entremise d’un ami l’histoire de Martiya, anthropologue hollandaise, morte en prison où elle était enfermée depuis une quinzaine d’année pour le meurtre d’un pasteur. Intrigué par cette histoire, Mischa y voit un possible article et se met à enquêter.
« Fieldwork » est le récit d’une double passion. Celle de Martiya pour les Dyalo, la population qu’elle a décidé d’observer, et celle de Berlinski pour l’histoire de Martiya qui l’amène à pratiquement changer de vie. A première vue, ce n’est pas bien original. Rassurez-vous, à seconde vue non plus. Pourtant, il y a quand même quelques éléments qui permettent au livre de ne pas être la « snorefest » annoncée. Il y a trois choses que l’auteur fait (vraiment) bien. L’aspect anthropologique est remarquable, d’autant plus lorsqu’on se rend compte que ce qui semblait une peuplade réellement existante est en fait complètement imaginée. Le côté vivant et parfois fascinant de la description de leurs coutumes est d’autant plus frappant. Berlinski s’attarde aussi longuement sur le monde des pasteurs protestants venu évangéliser l’Asie. Encore une fois, c’est très bien fait. La présentation est convaincante, laisse transparaître une attirance assez légitime pour le sujet, sans tomber ni dans l’apologie ni dans la critique gratuite de ces gens. Le troisième élément vaut surtout par son absence : Berlinski ne développe ni le mythe du bon sauvage, ni celui du caractère essentiel de l’œuvre civilisatrice des missionnaires. Fort bien, mais toutes ces qualités s’apparente au travail d’un bon journaliste. Il faut bien se rendre compte que ce n’est rendu possible que par de longues lectures des littératures des domaines concernés, leur bonne digestion et leur réutilisation harmonieuse. Et le travail propre du romancier ? Eh bien, c’est là que Berlinski se plante.
Il y a au cœur de « Fieldwork » la promesse de la résolution d’un mystère. Pourquoi une anthropologue a tué un missionnaire ? Avant même l’entame du livre, j’avais une réponse. Heureusement, elle était fausse et j’ai donc eu une agréable surprise dans les dernières pages. Maigre récompense : finalement, ce mystère du meurtre, on n’y accroche pas. Berlinski a beau essayer, ça ne marche pas. On s’en fiche. De même, il s’avère incapable de faire comprendre au lecteur la fascination que son alter-ego romanesque ressent pour Martiya. Pourquoi perd-il tant de temps sur ses traces ? Impossible à savoir. J’en suis toujours perplexe. Et finalement, vous savez bien que tout enquête digne de ce nom se doit d’être bloquée à plusieurs reprises jusqu’à ce qu’un événement de type deus ex machina relance le processus : c’est bien entendu le cas ici, mais les tours de passe-passe de Berlinski sont tellement mauvais qu’il n’élicitent qu’un bâillement prolongé.
« Fieldwork » n’intéressera que les amateurs de la Thaïlande, les fans d’anthropologie et les missionnaires. Ceux qui aiment la littérature n’y trouveront rien, pas plus que ceux qui aiment les bonnes histoires. Et de toute façon, soyons certain qu’il y a foule d’essais sur les sujets abordés par Berlinski qui sont bien plus intéressants à lire.
Mischa Berlinski, Fieldwork, Farrar, Strauss & Giroux, $24.00
(Bien que le personnage s'appelle Mischa Berlinski et partage quelques traits avec l'auteur, il s'agit d'une fiction)
3 commentaires:
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Si tu gardes le Denis Johnson pour la fin, c'est qu'il est si bon que ça?
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Ou encore tu ne l'as toujours pas reçu...
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C'est, en effet, que je ne suis pas cetain de l'avoir lu d'ici à mercredi. Je joue de malchance avec ce livre.