Une critique pour quoi faire

J’ai lu ici ou là que le dernier Cadiot était une parabole de ceci ou une méditation sur cela. Je me gratte la tête, grimace, et décide finalement qu’il n’en est rien. Le verbe est roi dans « Un nid pour quoi faire » et, de fait, pourquoi s’en faire ?

Chez un roi en exil, dans un chalet de montagne en ruine, un conseiller est, comme qui dirait, parachuté. Il est la boule qui percute le jeu de quille, envoyant tout valdinguer à l’aide d’une narration qui swing. Les noms chantent, les verbes dansent, les adjectifs virevoltent, les adverbes planent et les sujets objectent.

Le conseiller ne dit rien, les courtisans n’en pensent pas moins. L’équilibre est menacé, le château de carte vacille, pas plus mal que le Roi ne soit pas Reine de pique : il n’est pas dit qu’il s’en serait sorti la tête sur les épaules.

Voilà une série de scènes étranges où de coups en coups, de théâtre en Etat, le monde du conseiller bascule sur son axe, agrandissant sa zone d’influence politico-attractionelle, s’en allant de la périphérie dans laquelle il avait été installé pour se faire centre autour duquel tous gravitent. Et révolutionnent. Oh, coquin de sort !

Et là, la fuite. Il neige, et ça glisse. Le Roi était mort. Le Roi était sacré. Le Roi est nu. Son carrosse, il est cassé. Les caresses des dauphines de sa pine ne sont plus qu’un soubresaut de souvenir lui dardant le bout de la trique. Oh, avoir été pompé !

Retour qui n’est pas un recommencement. L’éternel s’est fait la malle, il ne reste qu’à jeter un œil de l’autre côté. Hmm, tant de regret. Et puis voilà, c’est dit :

« Ca s’arrête en bout de papier ».

Pas en eau de boudin.

Face au miroir de la salle d’eau, juste au dessus de la baignoire, je me dévisage la face et y reconnaît les traits de l’être perplexe. Mais oui, si cette histoire claque, si je m’emballe et dévale la piste, renouvellant l’effet boule de neige, une fois en bas, restera-t-il plus que des courbatures ? Et si non, les contorsions de la langue serviront-elle de séance de kiné ?

Tiens, séance. Il y en a une dans ces pages. D’outre-tombe, on appelle le spectre d’un auteur déjà passé à autre chose, il donne la clé. La voici :

« Je vois des formes (…), ce ne sont pas des paroles mais des choses avant la musique, des dessins, des plans d’idées, où une flèche suffit à dire très vite le temps (…), il y a des descriptions, ça vient se coller entre les phrases et les sons, comme un ciel bleu suit impeccablement les contours d’un immeuble ».

Je le vois. Vous aussi vous le verrez. Peut-être.

Olivier Cadiot, Un nid pour quoi faire, POL, 19€

 

1 commentaires:

  1. Anonyme said,

    Je n'ai rien compris, mais j'ai l'impression - la certitude - que l'excuse symboliste ("c'est une critique urgente et indispensable de la loi de l'argent dans l'Amérique de Bush" - lecteur, si tu es pigiste à Libé, tu peux reprendre gratuitement ma phrase pour ta prochaine critique de film, même s'il s'agit du dernier Disney) vise en fait à donner de la profondeur à ce qui n'en a pas. Certains génies arrivent à pondre 200 pages devant une casserole de moules de Broodthaers ou la nouvelle pitrerie autolâtre d'Angot, alors que les oeuvres de Melville (réellement symbolistes) se défendent toutes seules. Le roman réussi a plusieurs niveaux, le premier, considéré comme le plus trivial (l'histoire), étant la clé de voûte des autres. Hors ça, pas de roman, juste des élucubrations.

    on 10:48 PM


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